Préposé à la protection des données et transparence Jura-Neuchâtel

Renseignements pouvant être donnés sur un débiteur suisse ou frontalier (2013.0340)

Protection des données

Quels renseignements sur les débiteurs suisses ou frontaliers peuvent-ils être donnés à des créanciers ?

Avis du PPDT 2013.0340/ 0389/0381 publié le 30 avril 2013

* Lorsque le demandeur est un créancier (y compris les sociétés de recouvrement et de renseignement, ainsi que les autorités étrangères ne passant pas par l’entraide judiciaire ou administrative internationale), en principe seule la destination de la personne concernée peut être communiquée si le demandeur justifie qu'il détient une créance envers elle (contrat de bail, un acte de défaut de bien, une reconnaissance de dette, un jugement condamnatoire, un contrat de leasing, des titres de mainlevée provisoire et définitive, un commandement de payer, une réquisition de poursuite, …).

A relever que les entités ne peuvent pas communiquer le nom de l’employeur d’employés frontaliers.

Les bureaux communaux de contrôle des habitants et des services de l’État sont souvent sollicités par des entreprises de recouvrement ou de renseignements économiques pour fournir des informations, tels que l'adresse, la profession, l'état civil, le nom du conjoint, etc.

Sans justification particulière, il n'est possible de fournir ponctuellement [1] que le nom, le prénom, l'adresse et la date de naissance d'une personne (art. 25 al. 2 CPDT-JUNE), pour autant que les exceptions de l'article 26 CPDT-JUNE ne soient pas remplies.

Selon l’article 25 al. 3 CPDT-JUNE, il est possible de communiquer l’état civil, l’origine, la profession, le sexe et la nationalité, la provenance et la destination d’une personne [2], à condition que le demandeur justifie d’un intérêt digne de protection à la communication primant celui de la personne concernée à ce que ces données ne soient pas communiquées.

Plus spécifiquement, lorsque le demandeur est un créancier (y compris les sociétés de recouvrement et de renseignement, ainsi que les autorités étrangères ne passant pas par l’entraide judiciaire ou administrative internationale), en principe seule la destination de la personne concernée peut être communiquée si le demandeur justifie qu'il détient une créance envers elle (contrat de bail, un acte de défaut de bien, une reconnaissance de dette, un jugement condamnatoire, un contrat de leasing, des titres de mainlevée provisoire et définitive, un commandement de payer, une réquisition de poursuite, …).

Pour obtenir les autres données précitées, le créancier doit justifier qu’il en a impérativement besoin pour recouvrer sa créance.

Par ailleurs, les entités ne peuvent pas communiquer le nom de l’employeur d’employés frontaliers, bien qu’elles soient régulièrement sollicitées.

Les entités de l’administration cantonale obtiennent cette information par l’intermédiaire du système d’information central sur la migration (SYMIC).

Or, l’article 9 de l’ordonnance SYMIC (RS 142.513) prévoit que l'accès à SYMIC est accordé aux autorités cantonales exclusivement pour qu’elles puissent accomplir les tâches qui leur incombent dans le domaine des étrangers. Le renseignement de créanciers ne fait pas partie de ces dernières. Cette disposition doit être considérée comme une base légale interdisant la communication, au sens de l’article 26 al. 1  let. b CPDT-JUNE.

 De plus l'article 15 de cette ordonnance SYMIC précise, lorsque c'est l'ODM qui est sollicité, que: "L’ODM transmet aux personnes concernées les demandes de renseignement les concernant et émanant d’autorités étrangères, de particuliers ou d’organisations privées, pour réponse éventuelle. Il les rend attentives au fait qu’il n’y a aucune obligation de répondre à ces requêtes et que l’ODM ne communiquera pas de sa propre initiative les renseignements demandés. Il peut uniquement communiquer l’adresse et, en ce qui concerne les personnes relevant du domaine des étrangers, le genre d’autorisation de séjour des personnes, à des autorités étrangères, à des particuliers et à des organisations privées, lorsque le requérant rend vraisemblable que l’étranger concerné a refusé le renseignement dans le but de se soustraire à des prétentions fondées en droit ou d’empêcher la sauvegarde d’autres intérêts dignes de protection. L’ODM invite la personne concernée à se prononcer au préalable, dans la mesure où cela est possible et raisonnablement admissible."

Conformément aux règles de la loi fédérale sur la protection des données (RS 235.1), l’accès à SYMIC pourrait être remis en cause par les autorités fédérales s’il s’avérait que les règles de l’ordonnance ne sont pas respectées par des entités cantonales.

Quant aux entités communales, elles obtiennent le nom de l’employeur lorsque les personnes viennent notamment s’annoncer au contrôle des habitants, obtenir une attestation ou informer de leur changement d’adresse.

Cette information ne constitue pas une donnée devant figurer dans les registres des habitants, mais est nécessaire aux entités communales chargées du contrôle des habitants puisque la loi prévoit qu’elles peuvent demander aux employeurs des informations si les personnes concernées ne s’acquittent pas de leurs obligations (art. 12 Loi concernant le contrôle des habitants, RSJ 142.11; art. 48 LHRCH, RSN 132.0).

Bien que la récolte et l’utilisation du nom de l’employeur par les communes soient conformes à la CPDT-JUNE, il n’empêche que la communication aux créanciers de cette information ne bénéficie d’aucune base légale, puisqu’elle ne figure pas parmi celles devant être accessibles dans les registres des habitants.

En l’absence de base légale, il est néanmoins possible de communiquer des informations si le destinataire rend vraisemblable que la personne concernée ne refuse son accord ou ne s’oppose à la communication que dans le but de l’empêcher de se prévaloir de prétentions juridiques ou de faire valoir d’autres intérêts légitimes; la personne concernée sera auparavant invitée à se prononcer selon l'article 30 CPDT-JUNE.

Même si ces conditions sont remplies, il faut encore que les principes généraux, telles que la proportionnalité et l’exactitude soient respectés.

Or, en l’espèce, l’exactitude n’est pas garantie, puisqu’il n’y a pas d’obligation d’annoncer le changement d’employeur. Le principe de la proportionnalité n’est également pas respecté, car les créanciers étrangers n’ont pas impérativement besoin du nom de l’employeur pour poursuivre leurs débiteurs. Il ne sert qu’à utiliser des raccourcis procéduraux.

Enfin, les entités qui répondront négativement à une demande devront écrire un courrier dont le contenu minimum est suggéré ici.


[1] Un créancier ne peut pas adresser une liste de débiteurs à l’administration pour lui demander leurs coordonnées.

[2] Liste exhaustive, même si sa lecture de la disposition peut laisser penser qu’elle est exemplative. La lecture du rapport explicatif de la CPDT-JUNE montre qu’il y a eu une erreur de plume lors de la rédaction de l’article 25 al. 3 CPDT-JUNE.

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