Renseignements donnés aux tiers pour les personnes en formation dans le secondaire II (2013.0468 et 2013.0454)
Quels renseignements peuvent être communiqués à des tiers à propos des personnes en formation dans le secondaire II ?
Avis du PPDT 2013.0468 et 2013.0454 publié le 20 juin 2014
* Les communications de données personnelles par les entités du secondaire II aux représentants légaux des mineurs sont autorisées, sous réserve du respect de quelques modalités. En revanche, la communication de données personnelles aux parents de majeurs ou aux employeurs/formateurs de majeurs/mineurs n'est autorisée qu'avec le consentement de la personne en formation concernée.
Les entités du secondaire II sont régulièrement amenées à communiquer des données de personnes en formation à des tiers, tels que les représentants légaux ou les employeurs/formateurs. Les différents cas de figure qui peuvent se présenter sont traités ci-après.
Pour mémoire, l'article 13 al. 2 de la Constitution fédérale (11 al. 2 de la Constitution neuchâteloise et 8 let. b de la Constitution jurassienne) garantit le droit à l'autodétermination informationnelle (ATF 128 II 259 consid. 3.2, JdT 2003 I 411 (419); arrêt Cour EDH dans la cause Costa et Pavan c. Italie, n° 54270/10, § 55, 28 août 2012). Autrement dit, les personnes concernées doivent pouvoir décider du sort de leurs données personnelles, à moins que ce droit fondamental ne soit restreint selon les conditions posées par la Constitution (base légale, intérêt public et respect du principe de la proportionnalité).
De plus, les droits relatifs à la protection des données sont qualifiés de droits strictement personnels (Philippe Meier, Protection des données - Fondements, principes généraux et droit privé, Stämpfli 2010, p. 320, N. 836). Ils peuvent dès lors être exercés par les mineurs qui possèdent le discernement, sans l'aval de leurs représentants légaux.
Quant à l'article 25 CPDT-JUNE (Convention intercantonale relative à la protection des données et à la transparence dans les cantons du Jura et de Neuchâtel), il permet la communication de données à des tiers si une base légale le prévoit ou si l'accomplissement par le destinataire d'une tâche légale clairement définie l'exige.
A ce propos, l'article 275a Code civil (CC) prévoit que le parent non détenteur de l'autorité parentale, tout comme celui qui l'a détient, peut recueillir auprès de tiers qui participent à la prise en charge de l’enfant, notamment auprès de ses enseignants ou de son médecin, des renseignements sur son état et son développement.
L'article 301 CC impose quant à lui aux détenteurs de l'autorité parentale de déterminer les soins à donner à l'enfant, diriger son éducation en vue de son bien et prendre les décisions nécessaires, sous réserve de la propre capacité de l'enfant.
Mais l'article 305 CC précise que l'enfant capable de discernement soumis à l'autorité parentale peut exercer ses droits strictement personnels.
Au vu de ce qui précède, il faut distinguer plusieurs situations :
Communications d'informations aux parents d'un mineur
L'article 25 CPDT-JUNE permet de communiquer des données si l'accomplissement par le destinataire d'une tâche légale clairement définie l'exige.
En l'espèce, les parents de mineur peuvent obtenir les données relatives au parcours scolaire de leur enfant puisqu'ils ont le devoir de déterminer les soins à lui donner, diriger son éducation en vue de son bien et prendre les décisions nécessaires (art. 275a et 301 CC). Les données doivent cependant se limiter à celles nécessaires pour que les parents puissent réaliser ces obligations.
Pour les informations qui vont au-delà de celles indispensables, il faut le consentement du mineur lorsqu'il a le discernement.
Communications d'informations en ligne aux parents d'un mineur
Si les parents peuvent obtenir des informations sur leur enfant en formation en utilisant Internet, les remarques du point précédant s'appliquent, mais des conditions supplémentaires s'imposent au regard du respect des principes de la légalité et de la proportionnalité.
En effet, les traitements informatisés de données sont susceptibles de causer des atteintes à la personnalité plus conséquentes que les non informatisés. Or, plus l'atteinte potentielle causée par un traitement est grave, plus l'exigence d'une base légale formelle s'impose.
Par conséquent, il faut que les systèmes d'information utilisés par les entités du secondaire II pour gérer les données des personnes en formation bénéficient d'une base légale formelle, ainsi que le système permettant d'y accéder en ligne. Cette dernière possibilité offerte aux parents, nécessite à tout le moins une base légale, par exemple un règlement, adoptée par l'autorité exécutive cantonale et publiée dans La Feuille Officielle / Le Journal Officiel. L'adoption d'une base légale formelle est néanmoins vivement encouragée vu que les données en cause peuvent constituer un profil de la personnalité, c'est-à-dire des données sensibles.
Communications d'informations aux parents d'un majeur
Contrairement aux communications informant les parents d'un mineur, celles destinées aux parents d'un majeur ne bénéficient d'aucune base légale.
Par conséquent, aucune communication ne peut avoir lieu sans le consentement libre et éclairé préalable de la personne majeure en formation.
Communications d'informations aux employeurs/formateurs d'un majeur/mineur
La situation étant différente dans les cantons du Jura et Neuchâtel, ce sujet fait l'objet de deux réponses séparées :
Tant la Loi sur l’organisation de l’enseignement et de la formation des niveaux secondaire II et tertiaire (RSJU 412.01) que la Loi sur l'enseignement et la formation des niveaux secondaire II et tertiaire et sur la formation continue (RSJU 412.11), ainsi que leurs règlements d'application, ne contiennent de dispositions permettant aux entités de formation du secondaire II de communiquer des données aux employeurs/formateurs des personnes en formation.
Par conséquent, il faut impérativement le consentement libre et éclairé préalable de la personne en formation pour qu'une communication puisse se faire en respectant les exigences de la CPDT-JUNE.
Pour les mineurs ayant le discernement, le consentement doit être donné par ces derniers. Rien n'empêche de le demander préalablement aux parents pour éviter de froisser leur susceptibilité, mais c'est la détermination du mineur qui s'impose légalement.
Enfin, la communication des évaluations nominatives des personnes en formation à l'ensemble des employeurs/formateurs est totalement contraire aux principes contenus dans la CPDT-JUNE.
Tant la Loi sur la formation professionnelle (LFP, RSN 414.10) que son règlement d'application (RSN 414.110) ne contiennent de dispositions permettant aux entités de formation du secondaire II de communiquer des données aux employeurs/formateurs des personnes en formation.
Par conséquent, il faut impérativement le consentement libre et éclairé préalable de la personne en formation pour qu'une communication puisse se faire en respectant les exigences de la CPDT-JUNE.
Pour les mineurs ayant le discernement, le consentement doit être donné par ces derniers. Rien n'empêche de le demander préalablement aux parents pour éviter de froisser leur susceptibilité, mais c'est la détermination du mineur qui s'impose légalement.
En revanche, contrairement à celui du canton du Jura, le règlement neuchâtelois d’application de la loi sur la formation professionnelle (RSN 414.110) prévoit que les personnes en formation informent le formateur du déroulement de la formation à l'école professionnelle et aux cours inter-entreprises.
En aucun cas les entités de formation ne peuvent se substituer à la personne en formation si elle ne respecte pas ses devoirs.
A relever l'existence d'un arrêté concernant l'accès aux prestations du Service de l'enseignement obligatoire et du Service des formations postobligatoires et de l'orientation (RSN 410.194). Il permet aux personnes ayant la charge d'un enfant mineur d'accéder aux données relatives à sa situation dans le cadre de sa formation professionnelle.
Ce droit d'accès est automatiquement supprimé à la majorité de l'enfant, sauf si ce dernier consent au prolongement.
La personne en formation peut également consentir à autoriser cet accès aux formateurs.