Préposé à la protection des données et transparence Jura-Neuchâtel

Communications des entités appliquant la Loi sur l’aide sociale (2019.3003)

Protection des données

Les membres des entités appliquant la Loi sur l’aide sociale LASoc sont-ils en droit de communiquer des données personnelles à d’autres entités ?

Avis du PPDT 2019.3003 publié le 31 décembre 2019, mis à jour le 19 août 2022

Des communications des membres des entités appliquant la LASoc peuvent se faire à d’autres entités, pour autant qu'il s'agisse du service de l'action sociale, du service chargé des contrôles ou de collectivités publiques désignées par le Conseil d'État et que les principes de la proportionnalité et de la finalité soient respectés.

L’article 28 LASoc prévoit que :

1Les membres des autorités et les personnes chargées de l'aide sociale sont tenus à un devoir général de réserve et de discrétion.

2Ils ne peuvent divulguer sans l'accord de l'intéressé ou de l'autorité compétente les faits dont ils ont eu connaissance dans le cadre de leur activité et qui doivent rester secrets

3Sont réservées les demandes de renseignements provenant du service et du service chargé des contrôles, ainsi que les échanges d’informations entre collectivités publiques ou à l’intérieur de celles-ci lorsque cette communication est nécessaire à l’exécution de leur tâche. Ces collectivités sont désignées par le Conseil d’État, après consultation du conseil des autorités d’action sociale.

Il s’agit d’un secret de fonction renforcé, mais s’ouvrant à une communication en faveur du service de l'action sociale, du service chargé des contrôles et d'autres collectivités désignées par le Conseil d'État.

Un avis du 18 août 2006 concluait que les services sociaux avaient la possibilité de communiquer des données en respectant le principe de la proportionnalité à d’autres entités, lorsque cela était nécessaire pour l’accomplissement des tâches de ces dernières.

Mais depuis cet avis, l’article 28 LASoc a été modifié le 1er janvier 2021 et la CPDT-JUNE est entrée en vigueur en 2013 en introduisant de nouvelles notions sous l'impulsion du droit européen (notamment le principe de la finalité et la notion de données sensibles).

Dorénavant, le Conseil d'État désigne les autorités auxquelles il est possible de communiquer des données relevant de la LASoc en dehors du service de l'action sociale et du service chargé des contrôles. Pour figurer sur la liste, le destinataire doit bénéficier d’une loi adoptée par son organe législatif dans laquelle figure sa tâche imposant l’obtention des données personnelles des bénéficiaires (aucune liste n'a été publiée jusqu'au 19 août 2022).

La désignation d'un destinataire ne supprime pas le devoir de respecter les principes de la proportionnalité et de la finalité.

Ce dernier impose que tout traitement de données à caractère personnel soit effectué pour une finalité particulière bien définie et uniquement pour des finalités supplémentaires compatibles avec la finalité initiale. Chaque nouvelle finalité du traitement de données qui n’est pas compatible avec la finalité initiale doit avoir sa propre base juridique et ne peut se fonder sur le fait que les données ont été collectées ou traitées initialement pour une autre finalité légitime. La communication de données devra être envisagée avec prudence car la divulgation constituera généralement une nouvelle finalité et, par conséquent, nécessitera une nouvelle base légale, distincte de celle de la collecte des données, surtout en présence de données sensibles. L’utilisation de données à des fins compatibles est permise sur le fondement de la base juridique initiale. Les données ne doivent pas faire l’objet d’un traitement ultérieur que la personne concernée pourrait considérer comme inattendu, inapproprié ou contestable. Afin d’établir si la finalité d’un traitement ultérieur est compatible, le responsable du traitement devrait tenir compte, entre autres :  

  • de tout lien entre ces finalités et les finalités du traitement ultérieur prévu ;

  • du contexte dans lequel les données à caractère personnel ont été collectées, en particulier les attentes raisonnables des personnes concernées, en fonction de leur relation avec le responsable du traitement, quant à l’utilisation ultérieure desdites données ;

  • de la nature des données à caractère personnel ;

  • des conséquences pour les personnes concernées du traitement ultérieur prévu ; et

  • de l’existence de garanties appropriées à la fois dans le cadre du traitement initial et du traitement ultérieur prévu.

Lors du traitement ultérieur, l’information de la personne concernée au sujet de ces autres finalités et de ses droits, y compris le droit de s’opposer au traitement, devrait être assurée (manuel de protection des données, p. 136 ss).

Il n’est pas possible de tirer de ce qui précède une règle générale explicite s’appliquant à toutes les communications. L’examen de la finalité se fait au cas par cas. Par exemple :

  • Les avocats ou des compagnies d’assurances ne sont pas en droit de récolter des données sans le consentement des bénéficiaires, faute de base légale.

  • La police neuchâteloise n’a pas de base légale suffisante pour récolter des informations auprès des services sociaux. Si tel était le cas, le principe de la finalité ne serait pas respecté, étant donné que le bénéficiaire subirait des conséquences inattendues. À relever que l'art. 91 al. 2 LPol NE ne concerne que le changement de finalité des données déjà légitimement récoltées par la police neuchâteloise.

Le principe de la proportionnalité impose que seules les données personnelles nécessaires à l'accomplissement des tâches du destinataire peuvent être communiquées.

Pour assouplir les limites imposées par le principe de la finalité, il n’est pas possible de recourir à l’article 3 CPDT-JUNE, même si celui-ci  permet, si cela est nécessaire, que les cantons adoptent des lois spéciales dérogeant à la CPDT-JUNE. Car la dérogation ne peut se faire que dans le cadre des principes de la CPDT-JUNE. Autrement dit, une loi cantonale ne peut pas déroger au principe de la finalité. Du moins, pas à travers une disposition relative à la communication.

En revanche, la LASoc pourrait prévoir que les données ne soient pas récoltées exclusivement dans le but d’examiner l’octroi ou non de prestations sociales, mais aussi pour d’autres tâches spécifiques énumérées clairement. Pour les communications avec la police, il faudrait expressément indiquer que les données puissent être récoltées pour les tâches dévolues à celle-ci.

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