Historique
La protection de la personnalité doit évoluer au gré des nouvelles atteintes constatées. Le législateur agit régulièrement davantage en réaction qu'en anticipation.
Pour l'anecdote, le célèbre roman "1984" de Georges Orwell décrivait déjà et étonnamment en 1949 certaines problématiques rencontrées de nos jours. Une autre œuvre, moins connue, datant de 1944, "Cinéma total" de René Barjavel a inspiré le réalisateur J.K. Raymond Millet. Ce dernier, en réalisant un documentaire (extrait Youtube), évoquait, tout aussi étonnamment, en 1947 déjà, le visiophone, le téléphone portable, l’internet nomade, la télésurveillance, les images virtuelles, la télévision à la demande, la télévision en 3D, les lunettes connectées, ainsi que la réalité augmentée, les réseaux sociaux ou encore les applications de rencontres, et même les amours virtuelles (INA).
Les législateurs jurassien et neuchâtelois ont néanmoins aussi fait preuve d'anticipation, en adoptant des règles en matière de protection de la vie privée, respectivement en 1982 et 1986, mais sans octroyer beaucoup de ressources aux autorités chargées de surveiller la bonne application des règles, avant même que le scandale des fiches n'éclate (fin 1989).
En 2008, la Suisse adhère à l'espace Schengen. Depuis, les polices et services des migrations cantonaux et fédéraux, ainsi que les douanes ont accès à un système d'information (Système d'information Schengen, SIS) dans lequel peuvent être signalés les objets volés et les personnes recherchées par la police aux fins d'extradition, ou sous le coup d'une interdiction d'entrée ou encore portées disparues.
Afin d'assurer le respect de la personnalité des citoyens, le droit européen a imposé aux pays voulant utiliser le Système d'information Schengen (SIS) de se doter de règles et d'autorités indépendantes en matière de protection des données (décision-cadre 2008/977/JAI).
Parallèlement, le Conseil de l'Europe, cherchant à renforcer l'application du droit au respect de la vie privée contenu à l'art. 8 CEDH, a adopté la Convention 108. Cette dernière instaure également des règles et des autorités indépendantes en matière de protection des données.
C'est pourquoi le ministre jurassien des finances, de la justice et de la police (Charles Juillard) et le chef du département de la justice, de la sécurité et des finances neuchâtelois (Jean Studer) ont chargé un groupe de travail de rédiger une convention à propos de la protection des données et de la transparence, qui a débuté ses travaux au printemps 2009. Pour l'anecdote, en qualité de député du Grand Conseil, Jean Studer a défendu l'adoption du droit fondamental à la transparence, puis en qualité de chef du Département chargé des finances cantonales, il a dû prévoir le financement de la nouvelle autorité chargée de surveiller la bonne application des règles sur la transparence.
Cette démarche, qui était une première en Suisse, était marquée par la volonté de renforcer la collaboration entre les cantons de Neuchâtel et Jura. La création d'une institution commune dans le domaine de la protection des données et de la transparence avait pour but de permettre aux deux cantons de disposer de personnes confrontées à une masse critique suffisante d'affaires pour acquérir une expertise certaine, accroître la visibilité de leur action et développer des synergies.
Le projet élaboré par le groupe de travail a fait l'objet d'une large consultation (à disposition sur internet) entre le 21 octobre et le 31 décembre 2010.
A l'issue de cette procédure, l'ouvrage a été remis sur le métier et les principales critiques, émises à l'encontre des nouvelles autorités de protection des données et de transparence proposées, ont été prises en compte par le groupe de travail. Le projet, avalisé par les exécutifs des deux cantons les 13 et 14 septembre 2011, a été transmis aux Parlements jurassien et neuchâtelois pour examen par les commissions parlementaires ad hoc. Une commission interparlementaire (CIP) a été désignée, selon la procédure prévue par la convention intercantonale sur la participation des parlements (CoParl). La CIP s'est réunie en plenum le soir du 30 janvier 2012 aux Breuleux et a adopté le projet sans amendement (Rapport 12.024 du Conseil d'Etat NE au Grand Conseil du 9 mai 2012).
La CPDT-JUNE a été adoptée par le Grand Conseil le 4 septembre 2012 et par le Parlement jurassien le 5 septembre 2012. Elle a pour but de régir la protection des données et la transparence et met en place deux autorités communes, à savoir un PPDT, dont le siège était basé aux Breuleux jusqu'en juin 2024, et une commission de la protection des données et de la transparence (ci-après: la Commission), composée de cinq membres et dont le siège est basé à La Chaux-de-Fonds.
Le PPDT a été nommé le 20 décembre 2012 et est entré en fonction le 1er janvier 2013.
Depuis lors, tant la Directive que la Convention 108 ont été révisées. Désormais, ces textes ont été respectivement remplacés par la Directive 2016/680 et la Convention 108+. Ces changements ont imposé aux Cantons suisses et à la Confédération d'adapter leurs lois. C'est pourquoi des modifications de la CPDT-JUNE ont été introduites le 1er octobre 2022.
Pour ce faire, un groupe de travail a été constitué au printemps 2017, avec une représentante de chaque police cantonale, deux représentants du service juridique jurassien et un (puis une) de leur homologue neuchâtelois, ainsi que le PPDT (dossier 2016.1638).
Une première séance de travail a eu lieu le 13 juin 2017 aux Breuleux et la présidence du groupe a été confiée au PPDT. Les suivantes ont eu lieu les 8 septembre 2017, 19 novembre 2017, 27 mars 2018, 8 novembre 2018 et 24 mai 2019. Bien que non représentée dans le groupe de travail, des échanges réguliers de points de vue ont eu lieu avec la CPDT, et plus particulièrement son président. La révision s'est fortement fondée sur le "Guide pratique rédigé par la Conférence des gouvernements cantonaux (Guide pratique CdC) Réforme européenne de la protection des données/Modernisation de la Convention du Conseil de l’Europe (Convention 108) : Adaptation des lois cantonales sur (l’information et) la protection des données", adressé aux cantons le 3 février 2017 par la Conférence des gouvernements cantonaux (CdC).
De nombreuses communications ont été échangées par voie de circulation, surtout de mi-2019 à mi-2021, date de la soumission du projet aux exécutifs. Il était attendu le texte définitif de la LPD, publié le 6 octobre 2020 (FF 2020 7397), afin de pouvoir coller au texte fédéral et profiter de son interprétation par les autorités judiciaires suisses.
Les deux Gouvernements ont adopté le projet durant l'été 2021 et ont demandé aux deux législatifs, le 18 août 2021, s'ils souhaitaient la constitution d'une commission interparlementaire ou non (choix offert par l'art. 12 CoParl). Les deux Parlements ont répondu par la négative le 19 octobre 2021.
Le 9 mars 2022, les deux Gouvernements ont transmis le projet de révision partielle de la CPDT-JUNE aux deux Parlements. Il a été adopté par le Grand Conseil neuchâtelois le 30 mars 2022 et par le Parlement jurassien le 23 juin 2022.
Par arrêté du 31 août 2022, l'entrée en vigueur a été fixée au 1er octobre 2022.
Le version révisée de la CPDT-JUNE a été soumise au DFJP, qui a répondu le 12 décembre 2022 en émettant une réserve sur le contenu de l'art. 25 al. 2 CPDT-JUNE. Mais suite aux précisions adressées le 14 février 2023 par le Gouvernement jurassien (notamment en relevant que cette disposition doit se lire à la lumière de l'art. 26 CPDT-JUNE), le DFJP a revu sa position dans un courrier du 21 mars 2023.
Documents 2022 relatifs à la 1ère révision de la CPDT-JUNE
Documents 2012 relatifs à l'adoption de la CPDT-JUNE
Consultation 2010 de la CPDT-JUNE
Anciennes lois sur la protection des données
Ancienne loi sur la transparence des activités étatiques
Documents 2022 relatifs à la 1ère révision de la CPDT-JUNE
Adopté en séance du Parlement du 22 juin 2022