Accès au nom d'un dénonciateur en matière d'assurances sociales (2013.0515)
Est-il possible d'obtenir le nom d'un dénonciateur dans le cadre des assurances sociales ?
Avis du PPDT 2013.0515 publié le 17 février 2015
* Le nom du dénonciateur ne doit pas être révélé dans le cadre des dossiers d'assurances sociales, si celui-ci a agi dans l'intérêt public des assurés, et non pas par malveillance; c'est-à-dire dans le seul but de nuire au dénoncé.
L'accès au nom d'un dénonciateur est régi par les articles 31 ss CPDT-JUNE, et plus particulièrement l'article 33 al. 1 let. a CPDT-JUNE qui prévoit que l'accès est restreint si un intérêt public ou privé prépondérant l'exige.
L'ancienne commission cantonale jurassienne de la protection des données à caractère personnel a eu l'occasion d'effectuer une telle pesée d'intérêt dans une décision rendue le 18 juillet 2009 (décision 2009.07.18).
Le Tribunal administratif fédéral est allé dans le même sens dans un arrêt A-5430/2013 du 28 janvier 2015. Il a considéré que :
"Dans ce contexte se pose en particulier la question de la divulgation de l'identité du dénonciateur. L'intérêt du dénonciateur doit alors être mis en balance avec celui de l'intéressé qui sollicite l'accès aux données en question. D'un côté, le requérant peut avoir intérêt à corriger le caractère potentiellement erroné de données fournies par le dénonciateur, à quoi il faut ajouter qu'il peut être empêché, en cas de restriction d'accès, d'intenter une action en dommages-intérêts à l'encontre du dénonciateur ou obtenir de sa part la réparation du tort moral subi. De l'autre, il faut considérer l'intérêt que le dénonciateur peut avoir à ce que son identité demeure confidentielle et le maintien de la motivation des informateurs à dénoncer les cas qu'ils constatent. La jurisprudence du Tribunal fédéral tient en effet compte, dans une certaine mesure, de la protection des informateurs et des tiers. Cela étant, le dénonciateur doit avoir agi parce qu'il considère qu'une intervention de l'autorité est justifiée dans l'intérêt public, et non par malveillance. Une dénonciation spontanée répondant à des considérations étrangères à la cause ne mérite en tous cas pas d'être protégée.
[…]
Il existe un intérêt public à tenir confidentielle l'identité du dénonciateur, lequel rapporte aux offices AI des éléments susceptibles d'avoir une incidence sur le droit aux prestations d'un assuré. Si la divulgation de l'identité de l'informateur était systématique, l'on pourrait légitimement craindre que les offices AI soient privés de cette source d'informations qui, selon les cas, peut s'avérer utile, que ce soit dans le cadre de l'examen initial du droit aux prestations ou dans le cadre de la lutte contre la perception indue de prestations en cours. Aussi, cette identité est en pratique traitée de manière confidentielle. Certes, dans certains cas, des motifs personnels peuvent inspirer une communication injustifiée. Cela étant, les spécialistes de la fraude s'en accommodent, car il ne faut pas sous-estimer l'effet préventif de la prise de conscience que l'AI prend au sérieux les faits rapportés par des tiers, même s'ils sont anonymes (ce qui est le cas d'un tiers des communications). Les motifs à la base de la dénonciation ne changent dès lors rien à l'intérêt public à la préservation du caractère confidentiel de l'identité des informateurs.
[…]
Finalement, l'on ne saurait considérer que l'intérêt du recourant à intenter une éventuelle action civile contre le dénonciateur représente un intérêt tel qu'il doive primer sur l'intérêt public tel que considéré ci-dessus" (Arrêt du Tribunal administratif fédéral du 28 janvier 2015, A-5430/2013, consid. 3.5.5, 4.3.1 et 4.3.4).