Préposé à la protection des données et transparence Jura-Neuchâtel

Accès au revenu et à la fortune imposables d'un contribuable (2018.2234)

Protection des données

À quelles conditions est-il possible d'obtenir le revenu et la fortune imposables ?

Avis du PPDT 2018.2234 publié le 29 juin 2018

Lorsqu'un citoyen demande le revenu et la fortune imposables d'un contribuable neuchâtelois, le Service des contributions n'a pas besoin d'informer préalablement ce dernier avant de communiquer l'information, contrairement à la pratique actuelle et conformément aux règles de la transparence.

Le Canton de Neuchâtel, contrairement à celui du Jura, connaît l'article 176 al. 4 LCDir (RSN 631.0) qui prévoit que :

Les montants de la fortune et du revenu imposables ressortant d'une taxation ayant force exécutoire ne sont pas couverts par le secret  fiscal; leur communication est autorisée aux conditions fixées par le Conseil d'Etat.

La consultation du registre des impôts fait l'objet de l'article 36 RELCDir (RSN 631.01) et est soumise aux conditions suivantes :

1Les bases de taxation (revenu, fortune, bénéfice, capital) contenues dans les registres d'impôt peuvent être consultées gratuitement:

a)  dans les offices de perception de l'Etat pendant les jours et les heures d'ouverture, entre 10 et 12 heures;

b)  dans les bureaux des communes, aux heures fixées par chacune d'elle.

2Pour tout renseignement donné oralement en dehors des heures prévues à l'alinéa précédant et concernant la taxation annuelle d'un contribuable, un émolument de 7 francs est dû.

3La communication d'un renseignement donné par écrit est soumise à un émolument de 12 francs et par téléphone à un émolument de 10 francs pour chaque taxation annuelle d'un contribuable.

Depuis l'adoption de l'article 176 al. 4 LCDir sont arrivés les articles 18 Cst. NE, 72 al. 3 let. a, 77  et 30 CPDT-JUNE, dispositions de rang supérieur aux règles cantonales, prévoyant qu'un accès est refusé si un intérêt prépondérant privé, en particulier de la personne concernée, l'exige. Lorsque la pesée des intérêts est indécise, les entités doivent offrir le droit d'être entendu aux personnes concernées.

Au vu de ces règles, de leur hiérarchie et de leur chronologie, le  PPDT et le Service des contributions avaient, selon le principe de précaution, convenu d'offrir le droit d'être entendu aux personnes dont il était demandé le revenu et la fortune imposables.

Or, le canton de Berne connaissait, jusqu'au 1er janvier 2016, l'article 164 Loi sur les impôts (LI; RSBE 661.11), qui prévoyait la publicité du registre sur l'impôt (revenu et fortune imposables), sans fixer de modalité d'accès particulier. De surcroît, contrairement à la Confédération et à bien d'autres cantons, notamment le Jura, le Canton de Berne connaît, comme celui de Neuchâtel, un droit constitutionnel pour l'accès aux documents officiels (art. 17 al.3 Cst. BE; RSB 101.1) qui est également limité si un intérêt privé prépondérant s'y oppose.

Le Tribunal fédéral a eu l'occasion de se prononcer sur le degré d'atteinte à la personnalité par le biais de l'accès au registre des impôts (arrêt 1C_447/2016 du 31 août 2017). Il a analysé l'article 164 LI BE sous l'angle de la restriction du droit fondamental au respect de la vie privée inscrit à l'article 13 de la Constitution fédérale. Il a laissé ouverte la question de savoir si la communication du revenu et de la fortune imposables constituait une atteinte à la vie privée (consid. 5.2) et s'est contenté d'examiner si les conditions de la restriction (art. 36 Cst.) étaient remplies (consid. 5.3 ss). En substance, les juges fédéraux ont notamment considéré qu'un accès inconditionnel au revenu et fortune imposables prévu dans une loi adoptée par le législateur cantonal ne peut pas être soumis à une pesée d'intérêts dans un cas d'application. Ils jugent que le législateur l'a déjà effectuée lors de l'adoption du texte légal (consid. 5.4) et qu'il est d'intérêt public (consid. 5.5) pour garantir une meilleure moralité fiscale (consid. 5.6).

Au surplus, le Tribunal fédéral admet que la communication du revenu et de la fortune imposables ne viole pas les règles sur la protection des données (consid. 5.4.4.). Enfin, il conclut que les autorités bernoises ne pouvaient pas restreindre l'accès au registre des impôts bernois pour la période précédant la modification de la loi sur les impôts bernois.

Les similitudes entre le droit neuchâtelois et bernois à propos de l'accès du revenu et de la fortune imposables, imposent aux autorités neuchâteloises de respecter l'arrêt du Tribunal fédéral.

Plus concrètement, l'article 18 Cst. NE, précisé par les articles 57 ss CPDT-JUNE, prévoit que tout un chacun est en droit d'accéder à un registre public (art. 70 CPDT-JUNE).

Conformément à l'opinion du Tribunal fédéral, la restriction fondée sur les art. 72 al. 3 let. a, 77  et 30 CPDT-JUNE n'est pas applicable en l'espèce puisque l'art 176 al. 4 LCDir (RSN 631.0), adopté par le Grand Conseil, et l'art. 36 RELCDir (RSN 631.01) prévoient expressément l'accès au registre, sous réserve de quelques modalités d'horaires et d'émoluments, sans que l'avis du contribuable concerné soit préalablement demandé.

En conclusion, la pratique mise en place d'entente entre le PPDT et le Service des contributions n'a plus lieu d'être.

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