Préposé à la protection des données et transparence Jura-Neuchâtel

Attestation de l'office des poursuites

Protection des données

Un citoyen demande que seules les créances reconnues et non payées figurent sur les attestations délivrées par l'office des poursuites

Avis du préposé du 3 mars 2005

Préambule

Un citoyen demande que seules les créances reconnues et non payées figurent sur les attestations délivrées par l'Office des poursuites, estimant que la réputation qui lui est faite à travers les attestations actuellement établies par l'Office, comprenant l'ensemble des poursuites dont il fait l'objet, est scandaleuse et discriminatoire; à son avis, propager de telles informations est tout simplement irresponsable et une violation grave de la sphère privée.

Avis

La délivrance d'attestations par l'Office des poursuites repose sur l'article 8a de la Loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite (LP), lequel est ainsi rédigé :

Toute personne peut consulter les procès-verbaux et les registres des offices des poursuites et des offices des faillites et s'en faire délivrer des extraits à condition qu'elle rende son intérêt vraisemblable.

Cet intérêt est rendu vraisemblable en particulier lorsque la demande d'extrait est directement liée à la conclusion ou à la liquidation d'un contrat.

Les offices ne doivent pas porter à la connaissance de tiers :

Les poursuites nulles ainsi que celles qui ont été annulées sur plainte ou à la suite d'un jugement;

Les poursuites pour lesquelles le débiteur a obtenu gain de cause dans l'action en répétition de l'indu;

Les poursuites retirées par le créancier.

Le droit de consultation des tiers s'éteint 5 ans après la clôture de la procédure. Les autorités judiciaires et administratives peuvent encore, dans l'intérêt d'une procédure pendante devant elles, demander la délivrance d'un extrait.

 La doctrine a relevé au sujet de cette disposition :

"Le droit à l'information – droit de consulter le registre des poursuites, le registre des personnes, les procès-verbaux et droit d'en demander des extraits, copies ou photocopies – est justifié par l'intérêt public qu'il y a à permettre aux intéressés d'être renseignés sur la solvabilité d'un partenaire en affaires et sur la mesure dans laquelle il est digne de confiance, car les données recueillies permettent non seulement d'éviter des pertes sur débiteur, mais encore, suivant les circonstances, d'intenter de nouvelles procédures d'exécution forcée contre un débiteur déjà inscrit et de choisir la procédure la plus adaptée à la situation que révèlent les registres et les procès-verbaux; cet intérêt public l'emporte sur la protection de la personnalité de celui qui est inscrit (ATF 115 III 88, JdT 1992 II 14, c. 3b) " (Gilliéron, Commentaire de la LP, ad art. 8a, n° 18).

Cependant, comme l'article 8a al. 1 et 2 le prévoit, la personne qui fait valoir son droit à l'information doit rendre son intérêt vraisemblable.

Ainsi que l'indique Gilliéron (op. cit., ad art. 8a, n° 20), la vraisemblance, dont il est question ici, doit s'entendre de l'impression qu'a l'autorité de poursuite, en se fondant sur des éléments objectifs, que les faits pertinents se sont produits ou existent, sans pour autant qu'elle doive exclure la possibilité que les faits aient pu se dérouler autrement ou soient autres. La question de savoir si le requérant justifie d'un intérêt personnel, actuel et digne d'être pris en considération doit être tranchée de cas en cas, en tenant compte des circonstances particulières de l'espèce, tout au moins lorsque le cas présente des particularités par rapport à son caractère répétitif. Mais l'autorisation de la personne sur laquelle des renseignements sont demandés n'est pas nécessaire (ATF 52 III 77, c.3). L'examen de cet intérêt par l'autorité ne doit pas être tracassier, et rien ne s'oppose à ce que le préposé ou l'organe de l'exécution forcée s'en remette aux affirmations du requérant s'il le connaît comme digne de confiance (cf. ATF 59 I 253, JdT 1934 I 67) (voir Gilliérion, op. cit., ad art. 8a, n°23). Comme le stipule expressément l'article 8a al. 2, cet intérêt est rendu vraisemblable en particulier lorsque la demande d'extrait est directement liée à la conclusion ou à la liquidation d'un contrat; mais il ne s'agit que d'un exemple.

En ces conditions, il n'apparaît pas que la délivrance des extraits concernant le citoyen par les Offices des poursuites du canton de Neuchâtel serait irresponsable; au contraire, elle repose sur la loi. Certes, cette délivrance peut porter atteinte à la protection de la personnalité, mais cela a été voulu par le législateur qui a estimé que le droit à l'information constituait un intérêt public qui l'emportait sur l'intérêt des débiteurs.

Il est vrai que le droit suisse permet à n'importe qui de faire notifier un commandement de payer contre n'importe qui, et même pour des créances inexistantes. Il en résulte pour le débiteur qui a formé opposition à une telle poursuite injustifiée un inconvénient vu la publicité du registre des poursuites. Toutefois, selon le Tribunal fédéral, il appartient au poursuivi se trouvant en pareille situation d'intenter l'action en constatation de l'inexistence de la créance déduite en poursuite, et au cas où le jugement sur cette action conclurait à la nullité de la poursuite, cette dernière ne pourrait pas être communiquée aux tiers comme le stipule l'article 8a al. 3 let. a LP (SJ 2003 p. 93 et les références).

Conclusion

Dès lors, selon le système légal suisse, il n'appartient pas à l'Office des poursuites de délivrer des extraits se rapportant uniquement aux créances reconnues et non payées, mais il est de la responsabilité de la personne concernée, si elle veut que les poursuites qu'elle estime injustifiées ne soient plus communiquées à des tiers, d'ouvrir en justice une action en constatation de l'inexistence de la créance déduite en poursuite.

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