Préposé à la protection des données et transparence Jura-Neuchâtel

Transmission à un parti politique de la liste des nouveaux citoyens

Protection des données

Un parti politique peut-il réclamer à l'administration communale la liste des novueaux citoyens de la commune ?

Avis du préposé du 19 septembre 2000

Préambule

Un parti politique peut-il, en regard de la législation relative à la protection des données et de la personnalité, réclamer périodiquement à l’administration communale la liste des nouveaux citoyens de la commune, nouveaux arrivants ou nouvellement majeurs, afin de leur envoyer systématiquement une information sur le parti et sur ses responsables locaux.

Avis    

A teneur de l’article 31 de la loi sur le contrôle des habitants (LCDH ; RSN 132.0), la communication à des tiers de données relatives à une personne déterminée est régie par la législation cantonale en matière de protection de la personnalité.

La loi cantonale sur la protection de la personnalité (LCPP ; RSN 150.30) ainsi que son Règlement d’exécution (RSN 150.31) distinguent deux cas de transmission des données : la remise par l’administration de listes occasionnelles de données et la remise de listes répétitives.

Lorsque la demande de remise de listes occasionnelles concerne le canton, plusieurs communes ou une autre personne ou institution soumise à la loi, le Conseil d’Etat statue ; cette compétence appartient au Conseil communal lorsque la liste dont la communication est demandée ne concerne qu’une commune (article 23 alinéa 2 du Règlement). Les demandes soumises au Conseil d’Etat sont transmises pour préavis aux communes, à la personne ou à l’institution soumise à la loi dont relève le fichier concerné (article 23 alinéa 3 du Règlement). Des listes occasionnelles de données peuvent être transmises aux conditions suivantes : seuls les nom, prénom, adresse, date de naissance, sexe et profession peuvent être communiqués ; le requérant doit justifier d’un intérêt digne de protection et utiliser les données transmises dans un but idéal ; les intérêts des personnes concernées ne doivent pas être mis en danger (article 23 alinéa 1 du Règlement).

Quant aux listes de données répétitives, le Conseil d’Etat est compétent pour statuer sur les demandes, qu’elles concernent le canton, une seule ou plusieurs communes, ainsi que les personnes ou institutions soumises à la loi (article 24 alinéa 2 du Règlement). Les demandes sont transmises pour préavis à la commune, à la personne ou à l’institution soumise à la loi dont relève le fichier concerné (article 24 alinéa 3 du Règlement). Des listes répétitives de données peuvent être transmises aux conditions suivantes : seul les nom, prénom, adresse, date de naissance, sexe et profession peuvent être communiqués ; la communication des données répond à un intérêt public (article 24 alinéa 1 du Règlement).

Il appartient donc soit au Conseil d’Etat, soit au Conseil communal de se déterminer selon son appréciation sur les demandes de remise de listes occasionnelles ou répétitives. Par conséquent, l’Autorité de surveillance LCPP n’entend pas se substituer à eux et porter atteinte à leur pouvoir d’appréciation.

Je peux toutefois vous faire part de ce qu’a retenu la Préposée fribourgeoise à la protection des données dans le cadre de problèmes similaires en regard de la loi sur la protection des données (voir le « guide à l’attention des communes, exemples tirés de la pratique » ; avril 1999, page 53 ss). La Préposée relevait ainsi que la communication à un parti par une commune d’une liste des jeunes ayant atteint la majorité civique et des personnes nouvellement arrivées dans la commune n’est pas en opposition avec la protection des données. En effet, la condition portant sur l’utilisation des données à des fins idéales est remplie, dans la mesure où le parti politique requérant est implanté dans le paysage politique du canton. Il appartient cependant à l’autorité compétente de décider, notamment de déterminer s’il s’agit d’une fin idéale digne d’être soutenue, en procédant à une pesée des intérêts en présence, si elle accepte la communication, elle devra préciser que la liste ne peut pas être utilisée à d’autres fins et doit être détruite après utilisation.

En tous les cas, l’article 20 de la loi fédérale sur la protection des données (LPD ; RS 235.1) prévoit que la personne concernée qui rend vraisemblable un intérêt légitime peut s’opposer à une communication de données personnelles déterminées. Le droit cantonal neuchâtelois n’est pas aussi détaillé à ce sujet. Pour une partie de la doctrine, ainsi que pour le Préposé fédéral à la protection des données, les dispositions cantonales doivent fournir une protection comparable (vergleichbare Schutzwirkung) à celle de la loi fédérale par rapport au cas concret (Kommentar zum schweizerischen Datenschutzgesetz, Helbin & Lichenhahn, p. 446 ss ; 1er rapport d’activité du Préposé fédéral à la protection des données 1993/1994, p. 141 ss). Cet avis est convaincant ; dès lors, le droit d’opposition de la personne concernée prévu par la LPD doit également être donné dans la domaine cantonal.

Il en résulte que le citoyen doit connaître son droit d’opposition à la communication au parti politique de ses données détenues par le contrôle des habitants. S’il vient à s’opposer à la communication, la commune devra respecter sa volonté s’il rend en outre vraisemblable un intérêt légitime.

Finalement, comme la Préposée fribourgeoise le retenait, les données reçues par la parti politique ne pourront être utilisées que dans le but qui a justifié leur communication, et elles devront être détruites après usage.

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